Sex and the
château-fort
La Princesse de
Montpensier, ne nous voilons pas la face, c’est avant tout une histoire de
coucheries, parties de jambes en l’air, baise, sexe, ramonage de cheminée (car
autrement il fait froid dans le château).Rien d’étonnant à tout cela, puisqu’à
la base ce film n’était qu’un porno (on remarquera que l’appellation films pour adultes est totalement
désuète et inappropriée pour un genre majoritairement sollicité et regardé par
ados et préados débordants d’hormones et dont on jurerait, en se fiant à leur
consommation de mouchoir, qu’il sont allergiques) bon marché destinés aux
aficionados de la quatrième chaine (vous aurez d’ailleurs remarqué que ce film
est une production canal +) obligés de s’endormir devant des matchs de foot
afin de faire croire qu’ils n’ont pris l’abonnement que pour ça et qui, au lieu
de pouvoir passer leur premier samedi du mois à regarder des nymphettes en nuisette, sont obligé de se les geler dans
un stade en compagnie de supporteurs alcoolisés en survet’ car leur chère et
tendre, croyant leur faire plaisir, leur à offert une place pour le match du
soir, et pas des moindres : celle en plein dans le virage. On comprend
donc mieux la réalité de la violence dans cette partie des tribunes car, si les
supporteurs brulent les sièges et tentent désespérément de franchir les vitres
pare-balles les séparant des autres spectateurs, ce n’est pas parce qu’ils sont
fanatiques et légèrement dérangés, mais simplement parce qu’ils tentent par
tous les moyens de quitter le stade pour rejoindre au plus vite leur téléviseur
et ne pas manquer la scène où une jeune ingénue, rendue saoule par un jus
d’orange, commence à caresser sa copine parce que « c’est doux »,
l’autre se laissant faire « parce que ça chatouille », avant qu’un
bellâtre passant par là par hasard en caleçon ne vienne se joindre à elles.
Cela dit qu’ils se rassurent, car leur abonnement n’en est pas perdu pour
autant, puisque, pendant qu’ils se voient retenus dans le stade dans une odeur
de merguez et gaz lacrymogènes, leur copine, ayant invité au passage sa
meilleure amie, regarde ledit film pour « comprendre », parce qu’elle
« ne voit pas ce qui les attire là dedans ». Pourtant, quand le
malheureux regagnera enfin son appartement après la garde à vue réglementaire,
il se demandera pourquoi le stock de jus d’orange a été si rapidement liquidé
et les placards ont été ouverts et minutieusement fouillés. Que les femmes
cependant se rassurent car le marché du film X (il ne s’agit en fait pas de la
lettre « X » comme beaucoup voudrait nous le faire croire, mais du
chiffre romain « 10 », indiquant qu’un réalisateur de ce genre de
film ne tourne pas un, mais dix film en même temps (et avec les mêmes images))
se voit investi par des femmes tournant des films pour les femmes. Et le porno
féminin et à des lieues de son homologue masculin, en effet, dans un porno
classique la fille ne peut pas payer le livreur de pizza et du coup finie par
coucher avec lui là où, dans un porno féminin, la fille paye le livreur ET
couche avec lui (et lu offre même de la pizza ensuite), ce qui, soyons
d’accord, n’a rien à voir.
Mais ce n’est pas là le sujet. Pour en revenir au film du
jour, celui-ci était à l’origine intitulé La
Salope et devait raconter l’histoire d’une fille qui couche avec des mecs
(cela n’a l’air de rien comme ça mais il s’agit du niveau de scénario
pornographique le plus élaboré qui soit). Cependant, à l’heure d’entamer le
tournage, le réalisateur était morose. Il venait en effet de se faire coiffer
au poteau par son concurrent direct déjà en train de tourner son prochain film Les Salopes, l’histoire de deux filles
qui couchent avec des mecs. Impossible, pensait-il, de pouvoir contrecarrer ce
scénario en béton et cette imagination débordante. Ce fut alors, qu’avachi
devant sa télé un mercredi matin, il tombe sur une publicité pour les Princes
de LU, l’homme est frappé d’une illumination : et si il situait l’action
de son film à la fin du moyen âge ? Aussitôt dit, aussitôt fait et le
voilà qu’il change le titre pour La
Princesse afin de brouiller toutes pistes pouvant mener aux fameux gâteaux
fourrés. Le problème, c’est que dans sa catégorie les films d’époque
moyenâgeuse se résument souvent à un viking coiffé d’un casque acheté à la
boutique souvenir du parc Astérix et vêtu d’un tapis de douche imitation peau
de bête, rencontrant une jeune fille issue de la noblesse ayant décidée de se
baigner seule dans un lac isolé, ce qui permet ainsi d’éviter à la fois une
couteuse panoplie de chevalier et une toute aussi onéreuse robe de princesse. Cependant
le type est tellement motivé qu’il veut se démarquer totalement de la
concurrence et décide donc d’engager un costumier. Il se retrouve alors avec de
superbes habits d’époque, qu’il ne sait cependant pas utiliser car dans le lot
il n’y a aucune tenue de viking et il n’est pas question pour lui de mettre la
princesse d’entrée de jeu à moitié à poil dans le lac au prix où lui ont couté
les accessoires. Ne voulant pas abandonner son projet, il décide alors de faire
quelque chose qui n’a jamais été tenté auparavant dans l’industrie
pornographique : engager un scénariste. Malgré les avertissements de ses
collègues le faisant passer pour un fou, du moins ceux ayant saisi la fonction
d’un scénariste, il passe son annonce et trouve rapidement preneur. L’heureux
élu travail alors d'arrache-pied, transformant les dialogues de bas étages en
envolée lyriques et ajoutant épithètes, COD et autres COI aux répliques
monosyllabiques d’un couple surjouant leurs ébats. Un résultat pour le moins réussi
comme en témoigne cette réplique fameuse : « L’idée du péché, est-ce
déjà le péché ? » traduisant une phrase ayant bâti la carrière de
M. Ardisson « Est-ce que sucer c’est
tromper ?». Le seul inconvénient, c’est que là où la seconde phrase permet
un enchainement évident vers la chair et la luxure, son évolution retravaillée
autorise ce passage avec beaucoup moins de facilité. De plus, la fermeture
éclair n’étant guère répandu en 1500, il est pour les acteurs, extrêmement long
de se dévêtir. Et pas question pour eux de déchirer ou même de faire le moindre
accroc à leurs vêtements, du fait de leur prix prohibitif. Ainsi, la mort dans
l’âme, le réalisateur s’est résolu à laisser son film aux mains de la filière
classique. Les autres avaient bien raisons : un porno avec un scénario,
quelle hérésie ! Heureusement cette mésaventure ne lui a pas coupée sa
soif d’innovation et l’homme est déjà reparti vers de nouveaux horizons en
mettant sur pied un nouveau film révolutionnaire : Toutes des salopes, l’histoire d’un mec qui couche avec des filles.